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mercredi 14 novembre 2012

De Netvibes à Scoop.it : réflexions sur la signification éthique d'un prétendu progrès dans l'évolution des interfaces numériques.

Récemment, je suis allé consulter la page scoop.it d'un collègue. J'ai beaucoup aimé. J'ai découvert une sorte de journal de revue de presse, dans laquelle l'intervention humaine est promue à travers la sélection et la valorisation de l'information thématique. Sa manière de traiter l'information et sa sélection très pertinente est d'ailleurs, manifestement, déjà reconnue sur le web puisqu'il reçoit désormais son content de visiteurs journaliers.

J'ai du coup, eu la fiugitive et vague tentation de me créer un compte, - pour m'abonner au sien, pour commencer, et prendre exemple sur lui, pour continuer -. Je ne l'ai pas fait, principalement en vertu du principe d'inertie qui m'anime à chaque fois qu'il s'agit de "me" créer un nouveau "compte", car j'estime désormais, et ce depuis plus de deux ans, que je dispose de bien davantage de "comptes" ouverts sur diverses plateformes du Web "prétendument 2.0" (cf. mes billets précédent à propos de ce concept imbécile...) que je ne le souhaite déjà. J'ai déjà, de plus, des comptes ouverts sur divers plateformes d'outil de veille, tels que Reader et Netvibes, pour ne citer qu'eux.
Intuitivement (et outre ma paresse légendaire), je ne voyais pas d'intérêt particulier à sauter sur un énième outil numérique, tel le lapin bondissant sur une nouvelle laitue ! (et on dit pourtant que je suis syllogomane !)


...Et puis, je suis tombé sur cet article de Frédéric Martinet, et la lumière se fit en moi : autant du point de vue de la valeur ajoutée, que de l'infobésité, ou du droit d'auteurs, l'auteur formidable (que je découvre du même coup !) de ce billet formalisait exactement mon point de vue vaguement intuitif et informulé...


Quel peut bien être l'avantage d'un outil de "curation" comme scoop.it par rapport aux outils de veille (agrégateurs de flux) de la génération précédente comme Netvibes ou Reader (qui propose, de toute façon, des solutions de curation interne au site.) ?

Tele est la question que je me pose... Ces outils proposaient déjà des options de sélection et de partage social de l'information. Ils proposaient déjà le regroupement thématique des sources avec un suivi qui me semble d'ailleurs davantage pertinent puisqu'il impliquait encore la reconnaissance croisée entre source et thématique (sur une page Netvibes, les articles sont triés à la fois par onglets et par sources, puisque le suivi s'effectue suivant le fil RSS de la source.)

Certes, il y a un aspect automatique, là où, chez Scoop.it, on promeut l'intervention de la main humaine dans la publication sélective des informations. Il me semble que cet aspect de promotion "sociale" du partage n'est qu'un prétexte pour proposer du "design", mais aucune valeur sous-jacente (qu'elle soit ajoutée ou non) : il s'agit simplement de surfer sur la mode du "social networking" qui fait tendance car il recouvre à la fois l'aspect technologique et un ersatz (ou plutôt une apparence) de recentrage sur le relationnel et l'identitaire (fondements supposés -par moi- de la tendance actuelle au réseautage social.)

Alors que j'avais été assez fasciné par Netvibes à son époque, qui permettait une optimisation performante de la veille informationnelle, je n'éprouve en fait aucun enthousiasme, plutôt une certaine réticence - voire même une réticence certaine - à m'approprier ces nouveaux outils et les pratiques soi-disant nouvelles qu'ils prétendent impliquer. Tout cela m'apparaît en réalité, fatalement, relever d'un engouement pathologique pour l'innovation technologique (de l'outil) au mépris total du questionnement éthique, méthodologique, épistémologique, et fondamentalement, rationnel, de nos actes. Il me semble qu'il serait davantage pertinent de revenir sur une attitude plus saine de remise en cause des fondements de nos pratiques professionnelles et personnelles en terme de culture informationnelle (cf. mes interventions dans des débats ici et à propos du rapport de l'homme au progrès...) que de nous laisser entraîner dans une fascination pathologique par l'influence dominante d'un groupement d'intérêts progressistes qui cherche à faire prévaloir et à monter sur un piédestal l'importance fallacieuse de réalisations techniques qui ne se résument finalement qu'à de l'esthétique designée d'une interface sans intérêt nouveau par rapport aux interfaces précédentes... Une fascination pour l'outil plutôt que pour les savoirs-faire développés par son usage (qui, je le reconnais volontiers, sont cependant réels, selon certains professeurs de SIC).
Voilà ce que mr. Frédéric Martinet a bien compris : je ne vous livrerais qu'une citation (extraite d'une réponse de l'auteur à un commentaire sur son billet.) :
""J’ai essayé d’être clair dans le billet. La question essentielle à se poser est sur l’usage. Se regarder et [...] se demander si dans ce que l’on fait l’on est respectueux de ceux qui créent de la matière première car si l’on continue on se retrouvera avec 0,005% de contenus originaux et tout le reste d’abstracts, de rediffusion.
Si aujourd’hui on peut encore gagner du temps, je reste persuadé qu’au final jouer cette carte sans respecter les contenus originaux c’est perdre qualité ET efficacité, car cela ne peut conduire qu’à l’engorgement. ""

J'aimerais, cependant, dire un mot pour reconnaître la pertinence du travail qu'effectue mon collègue Terheck sur sa plateforme, ce qui me permettra de nuancer mon propos : oui, son travail prouve qu'on peut tout de même tirer un parti très intéressant de ces nouveaux outils. Il convient de ne pas en rester à ses propres positions et de savoir se rendre compte des cotés positifs du bouillonnement créatif humain, cet enthousiasme à créer, innover, inventer, sans toujours s'interroger sur la pertinence de cette inflation innovatrice :
on peut en retirer des expériences positives !

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